vendredi 11 novembre 2011

Plumes épistolaires, 2


Miss So, chère Miss So,

Quel régal !!! Quel bonheur de lire votre lettre, votre testament, vos derniers mots ! J'avoue que j'ai vraiment pris un plaisir immense, intense, à vous lire, à vous regarder vous métamorphoser. Vous êtes vraiment une de mes plus belles réussites, une de mes œuvres les plus complètes, parce que vous avez eu l'intelligence de jeter sur le papier vos sentiments, vos ressentis durant cette métamorphose. Peu d'entre vous sont capables d'une telle lucidité. Et vous observer, cette nuit, a été magnifique. C'était tellement... oui, jouissif. Si j'étais encore capable d'être heureux, alors oui, je crois que ce moment y ressemblerait furieusement. Un pur instant de bonheur. Vous ne pouvez imaginer combien j'ai aimé vous avoir dans mes bras, vous embrasser, vous serrer contre moi. Je voulais que vous veniez de votre propre initiative. Il ne m'intéressait en rien de vous avoir captive. Je vous voulais mienne. Simplement mienne, par votre volonté propre. Et vous étiez consentante ô combien ! Je vois dans votre "testament" que vous avez tenté d'analyser ce qui s'était passé : ces descriptions de votre transformation, ces deux petites blessures au creux de votre cou... je crois savoir où votre imagination débordante vous a conduite. J'ai trouvé dans votre sac des livres de littérature fantastique, des récits incroyables où il est question de vampires, de loups-garous et autres sorcières, furies et magiciens. Que c'est drôle, toutes ces représentations que l'on peut avoir sur le monde mystérieux de la nuit, sur les créatures maléfiques... Le mal existe, oui. Bien sûr. Mais il n'a pas d'apparence particulière, voyez-vous. Ce serait si simple, si on pouvait le voir, le reconnaître. Il suffirait alors, pour qui cherche à lui échapper, à faire le bien, de tourner les talons, de passer son chemin... Mais non, ce serait bien trop simple. Bien trop facile. Le Mal est plus vicieux, plus retors que cela. Il est invisible. Il se cache dans les êtres et les choses que l'on pense bénéfiques, au contraire. Sous l'apparence du bien-être, de la liberté, de la joie, il se cache, jusqu'à ce que nous soyons en son pouvoir. Alors seulement il sort de sa tanière, une fois que l'on est à lui et que l'on ne peut plus revenir en arrière, une fois qu'il est trop tard. Il se cache en chacun de nous, il n'attend qu'un faux-pas de notre part pour se manifester, pour nous donner l'occasion de se déchaîner, en déchaînant les passions et les plus bas instincts qui sont en nous, en chacun de nous.

Je ne suis pas un vampire, pas plus que tout autre monstre, d'ailleurs. Et vous n'êtes pas devenue une créature de la nuit. Vous êtes le résultat d'une expérience que je voulais mener, simplement. Je le confesse, j'ai joué avec vous, je me suis joué de vous. Et j'ai vraiment, vraiment passé un moment inoubliable. Comment ai-je fait ? Mais c'est simple... c'est si simple. Des drogues. Pour vous empêcher de percevoir la réalité, pour la travestir, pour voir comment l'image que vous avez de vous allait évoluer, quels seraient les sentiments qui vous habiteraient en vous voyant "changer". Il est facile de maquiller, de déguiser, d'habiller une pièce pour lui donner l'apparence que l'on veut. Des meubles préparés à l'avance pour vous donner l'illusion de la facilité, de la force indomptable qui vous habite... oh oui, j'ai réussi au-delà de mes espérances ! C'est merveilleux, l'esprit humain, sa faculté à voir, au-delà du réel, selon ce qu'il veut vraiment voir ! Vos "blessures" ? Ah oui, je dois reconnaître que j'ai dû, effectivement, vous faire un peu mal. Il fallait que l'illusion soit parfaite, je crois que vous en conviendrez. Et que vous apprécierez, en connaisseuse, mon souci de la perfection et du réalisme.

Demain, vos idées seront de nouveau claires. Demain, vous serez redevenue vous-même, chère Miss So.
Seulement, vous reviendrez à vous avec une question qui reviendra vous hanter chaque jour : quand vous vous regardez dans la glace, Miss So, ce que vous voyez, est-ce bien vous ? Savez-vous réellement qui vous êtes et ce dont vous êtes capable ?

Votre "Dracula" !

Amélie Platz, 9 octobre 2011


Cette lettre est ma réponse à celle de Miss So, pour le jeu d'Asphodèle et Aymeline, les Plumes épistolaires.

10 commentaires:

  1. C'est une manipulation rondement menée et décrite avec élégance. :-)

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  2. Saurons nous jamais exactement qui nous sommes?
    Ainsi donc, il y a un manipulateur dans notre dos !! :)

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  3. Une lettre interessante et déroutante : qui manipule, qui est manipulé? Est elle morte ou est ce aussi une manipulation ?

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  4. Mais c'est trop dur ! Je veux une suite, moi ! C'est un extraterrestre ? Il a un ton charmant. J'espère que derrière son masque de séducteur, il n'est pas plein de furoncles verts.

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  5. Elle est rondement menée, piquante à souhait cette lettre, je pensais que c'était "la mort" au départ... Très belle lettre à laquelle Miss So devra répondre non ?^^

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  6. Et dire que des scientifiques sont prêts à tout aussi, de nos jours...
    Ton Dracula des temps modernes est un peu inquiétant...

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  7. Je suis bien contente de savoir que cette "mort" n' est pas définitive ...

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  8. Quelle lettre ! On y croit toute la première partie et la révélation finale est époustouflante bravo !

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