jeudi 20 novembre 2008

Histoire de Gobol

J’ai écrit cette histoire en 2005, dans le but de la publier sur le site internet "Yoko Tsuno, l’amitié au bout du rêve", un site de fans de cette bande dessinée. En effet, Gobol est un des personnages secondaires de la bande dessinée, qui n’apparaît que dans un seul album, « Les Exilés de Kifa », paru en 1991 aux éditions Dupuis. Ce personnage m’intéressait car Gobol n'est présent en tout et pour tout que sur 6 pages de la bande dessinée. Or, c'est un personnage important, si on considère que dans la bande dessinée, il est à l'origine des Archanges, des « Anges gardiens », de la Reine Hégora , de Tryak et sans doute d'autres robots plus obscurs, moins connus…

Pour permettre aux lecteurs qui ne connaissent pas la bande dessinée de mieux cerner et comprendre l’histoire, je dirais que Yoko, l’héroïne, rencontre un jour les Vinéens par hasard, sous Terre, où ils se sont réfugiés au moment où leur planète était menacée de destruction. La planète ayant survécu, les Vinéens rentrent chez eux (au moins en partie), et Yoko les y accompagne de temps en temps. Elle les retrouve périodiquement, au fil de ses aventures, et c’est dans l’une d’elles, « Les Exilés de Kifa », qu’elle rencontre Gobol.
Comme on ne sait rien de lui, je lui ai « inventé » un passé. J'ai soumis ce récit à l’auteur de la bande dessinée, Roger Leloup, pour avoir son avis. Voici sa réponse, par le biais d’Emilia, son « avatar » sur le site :

"Merci Amélie pour ce beau texte... Il lit entre les images et comme le dit Roger quand le texte remplace l'image pourquoi la dessiner. (…)Tu peux mettre ton texte en lecture pour tous... Ils aimeront."

Et ensuite, par message personnel :

"J'espère que tu as bien reçu ma réponse par ton mail... Comme je te l'ai dit je trouve ton histoire de Gobol très bien faite... Tu lui donnes un passé fabuleux et une notoriété que les Exilés de Kifa n'ont pas su rendre. Tu dois en faire profiter tout le monde."

Voici donc l'Histoire de Gobol, telle que je l'ai comprise, en me basant sur de nombreux éléments des différents tomes de la bande dessinée.



Je vais vous raconter une histoire.
Celle d’un homme exceptionnel, aux capacités, au savoir immense.
Sa vie aurait pu être différente.
A-t-il eu tort ? A-t-il eu raison ?
A vous de juger… quand vous saurez…

I


Vinéa, il y a plus de deux millions d’années. Deux soleils, une petite planète en orbite. Six cités, regroupant la totalité de la population de la planète. Une population qui, telle une société d’insectes, donne une fonction particulière à chacun. Et chacun a sa place, importante, pour que la socété dans son ensemble fonctionne. Un grain de sable dans ces rouages bien huilés, elt la machine peut avoir du mal à tourner…

L’un des deux soleils a commencé à grossir. Le Cataclysme qui forcera la population vinéeenne à l’exil est en marche. Mais il est encore loin, et peu en ont réellement conscience, à l’exception des quelques astrophysiciens que compte la planète, et qui étudient sans relâche leur univers. Même s’il est lointain, ce cataclysme leur semble inévitable. Il est temps de commencer à chercher une solution…


II

Lôghar est un des scientifiques de la Deuxième cité. Il est un peu touche-à-tout, intéressé par toutes les sciences. Ses connaissances en biologie, mécanique, informatique font de lui un rouage important du complexe scientifique de Vinéa. Malgré ces connaissances, Lôghar, s’il est très apprécié dans sa section, est très seul. Les autres scientifiques travaillant avec lui le trouvent mystérieux, bizarre…voire mystique. Toujours sur « sa » planète, souvent loin des contingences quotidiennes des citoyens de Vinéa…

Intéressé par tous les champs de la connaissance, il ne cesse d’apprendre, d’approfondir, d’explorer… d’où cet éclectisme dont il fait preuve au laboratoire, et qui lui vaut tant l’admiration que les moqueries des autres. « Tiens, aujourd’hui, c’est la robotique, sa nouvelle marotte ! Et demain ? L’intelligence artificielle ? »

De fait, cela fait belle lurette que Lôghar s’intéresse à l’intelligence artificielle. Il a même quelques robots « intelligents » dans ses cartons, mais pour l’heure, personne n’en voit l’intérêt…

Et pourtant…

Pourtant, il y a ces déchets toxiques qu’on va envoyer sur Ixo. Les manipuler est dangereux. Pourquoi ne pas confier cette tâche à des robots intelligents, capables de prendre des décisions sur le stockage, l’entretien, voire le traitement de ces déchets ?
Lôghar finit par exposer ses idées au responsable de la section scientifique. Mais son robot n’est pas totalement au point, et la mission à laquelle son créateur le destine est bien trop importante pour supporter la moindre erreur. L’idée est entendue, et rejetée. Mais Lôghar se voit confier une autre mission : créer de petits robots intelligents, à destination des enfants, qui seraient capables de parfaire leur éducation scientifique et technique, de manière à continuer de former les techniciens du futur.

De simple technicien de laboratoire un peu bizarre, Lôghar devient un chef de projet visionnaire, avec des moyens bien plus importants que ceux dont il disposait auparavant. De petits robots volants et intelligents voient le jour, et son confiés aux enfants de Vinéa.

III

Mais Lôghar est déjà passé à autre chose. La création de ces petits êtres a déjà commencé à lui faire perdre la tête. Il était déjà différent des autres Vinéens. De plus en plus seul. Son côté visionnaire lui permet d’entrevoir les possibilités que pourrait lui offrir un androïde. Il commence alors à créer un robot plus élaboré que les petits confiés aux enfants. Et passe ensuite à l’étape suivante : la mise au point d’androïdes auxquels il donne forme humaine. Ils sont tous identiques, parfaitement réussi techniquement. Mais Lôghar ne les aime pas, il leur manque quelque chose. Il les juge fades : ils n’ont pas de personnalité, il ne parvient pas à leur donner un nom, une identité. Il continue ses recherches, et finit par créer un être différent, parfait. Pour pouvoir le créer différent, il lui donne un corps de femme.

Dans le même temps, un événement majeur intervient. Les dirigeants de la Deuxième cité ont engagé les leurs dans une lutte de pouvoir contre les cinq autres cités que compte la planète. Eclate alors ce qui sera appelé plus tard la « Guerre des Cités ». Après des mois de lutte acharnée, les partisans de l’unité parviennent finalement à la victoire. Les habitants de la Deuxième cité, vaincus, se mettent à rêver de revanche. Et Lôghar va leur en donner la possibilité.

Ses recherches sur les androïdes ne sont pas les seules à le faire avancer. Un autre projet s’est fait jour dans sa tête de plus en plus malade : créer une cité autonome, où il pourrait vivre avec ses androïdes. Ses travaux passent vite, avec l’aide des techniciens de la Deuxième cité, du plan à l’exécution. La Cité sera immergée. Nous sommes en effet aux prémices de la catastrophe. Le climat de Vinéa a commencé de se modifier. La température moyenne augmente sensiblement, le niveau de l’eau aussi, à cause de la fonte des glaciers des pôles… la superficie des océans de la planète augmente, et cela permettra de garder secrète l’existence de la cité…

Lors de sa création, et des travaux préparatoires sur site, Lôghar a découvert dans le sous-sol de Vinéa deux minerais rares, présents en petites quantités en quelques endroits de la planète, et connus depuis peu des scientifiques. L’un de ces minerais, le Vilésium, a été étudié par les biologistes de façon assez approfondie, et a révélé des propriétés régénératrices sur les cellules végétales et animales. L’autre, le Nacinium, n’a pas encore fait l’objet d’études approfondies, mais Lôghar, après la découverte du gisement sous-marin, a passé beaucoup de temps à le tester, à l’étudier, lors de son séjour prolongé dans la cité engloutie. Après des mois de recherches et de tests variés, Lôghar s’aperçoit qu’en mettant les deux minerais en présence, et en les soumettant à un intense rayonnement, les propriétés du Vilésium changent : la combinaison des deux minerais stoppe totalement le vieillissement des cellules. Elles deviennent immortelles…

Un arrangement entre Lôghar et les dirigeants de la Deuxième cité a été trouvé : Lôghar accueillera les enfants de la Deuxième cité. Pour ses habitants, ces enfants, une fois adultes, deviendront des techniciens de la revanche sur les autres cités. Pour Lôghar, ils seront ses hôtes, son peuple. D’autant plus que lui, Lôghar, touche-à-tout, sait que les jours de Vinéa telle qu’elle existe aujourd’hui sont comptés. Cette cité sous-marine est peut-être aussi une solution pour faire face au cataclysme qui s’annonce.

De créateur, Lôghar, quand son rôle sera connu, deviendra Sauveur…

IV

La cité engloutie devenue autonome, cinq cents mille enfants y sont envoyés. Mais Lôghar s’en désintéresse et la quitte, un nouveau projet en tête. Ce projet occupe déjà toutes ses pensées.

Il s’agit d’une demande des dirigeants de Vinéa : la création d’une cité spatiale éloignée de Vinéa, viable, permettant l’évacuation d’une partie de la population, si la planète devenait un jour invivable. De fil en aiguille, Lôghar s’isole encore davantage, et sa folie empire.

Le projet est abandonné, car jugé non viable par les dirigeants. Mais Lôghar est bien décidé à le mener au bout, seul, avec des robots qu’il crée exprès pour s’atteler à la tâche. Libéré des contraintes du temps, grâce à sa découverte des propriétés conjointes du Vilésium et du Nacinium, Lôghar a désormais tout loisir de mener à bien tous ses projets. Lors du cataclysme, il a déjà quitté Vinéa pour Kifa, sa cité spatiale. Il en a fait son Olympe, il en est devenu le maître incontesté et immortel, il a commencé de construire son armée de robots. Les dirigeants de Vinéa n’ont pas tenu compte de son travail. Ils ont ruiné ses efforts et l’ont dénigré, le traitant de fou, de mégalomane… La cité engloutie, de par l’origine de son peuple, doit rester secrète. Les petits robots éducateurs sont exilés sur Kifa, c’est-à-dire renvoyés à leur fabricant, car, devenus trop indépendants et critiques, ils influencent les enfants dans une direction qui n’est pas dans les vues des dirigeants de Vinéa… Kifa ne sera jamais la Cité-refuge des Vinéens, car les dirigeants ont choisi d’exiler la population vers d’autres systèmes solaires…

En fait, les dirigeants de Vinéa m’ont exilé, moi, Gobol,
sur Kifa, la cité spatiale que j’ai créée pour les sauver de la catastrophe ;
sur Kifa, qu’ils m’ont demandé d’éloigner de Vinéa
sous le faux prétexte de la protéger du cataclysme…
Quelle ironie…
Mais j’ai tout mon temps.
J’ai l’éternité devant moi…



Amélie Platz, Février 2005

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