mercredi 14 janvier 2009

De Lôghar à Gobol II

II


Ca n'a pas été sans mal, mais ça y est, je sais tout ce que je voulais savoir. Et là, il faut vraiment que tout cela se termine, et vite. Comment ai-je pu être aussi naïf ? Comment ai-je pu croire que les Vinéens avaient fait de moi ce que je suis parce que c'était dans leur nature ? Non, pour une fois, je n'avais rien vu, rien compris. Tout faux depuis le début. Il me faut maintenant tout révéler, sans quoi j'en perdrai définitivement la raison. Ensuite, je mettrai mon projet à exécution, et je détruirai ce monde, et ces insectes si prompts à oublier ce qu'ils me doivent...

III

Aknor m'a conduit sur Vinéa. J'y ai découvert un certain nombre de choses. Dont une très surprenante : les Vinéens ne sont pas les seuls êtres pensants présents sur la planète¹ . En tout cas, ils ne le sont plus. Il y a au moins deux autres espèces présentes ici. Dont l'une très proche d'eux biologiquement. Je n'en ai vu que trois spécimen, trois êtres qui leur ressemblent énormément : même taille, même anatomie... La plus grande différence est celle de la couleur de la peau. Elle est rose, et même pas identique pour chacun des trois, deux hommes et une femme. Aucun d'entre eux n'a pu me voir, heureusement ! Ils étaient de toute façon bien trop occupés à régler cette histoire d'insectes géants (l'autre nouvelle espèce pensante ayant pris ses quartiers sur Vinéa). Visiblement, les insectes géants semblent bien plus nombreux que la race rose d'êtres humains que j'ai pu observer... Enfin, tout cela n'a finalement que peu d'importance, bientôt, ils seront de toute façon tous détruits...

Mais je ne parviens pas à me calmer. Impossible de ne pas songer que pour d'obscures raisons, ils m'ont exilé, moi, l'un des leurs, parce que semble-t-il, j'étais trop différent d'eux. Et là, je découvre qu'ils ouvrent leurs portes à des êtres encore plus différents... qui viennent d'une autre planète, visiblement, avec une autre vision du monde, une autre organisation, vraisemblablement... comment espèrent-ils qu'ils vont s'adapter à une société qui n'est même pas capable d'intégrer tous ces enfants, et qui n'a d'autre solution que d'exiler ceux qui ne sont pas « intégrables » ? La « race » humaine rose vient d'une lointaine planète appelée « Terre ». C'est en tout cas ce que j'ai pu apprendre en les observant, et en écoutant ce qu'ils disaient. Il semble qu'ils aient des liens privilégiés avec ceux de la Sixième Cité. Mais je m'égare... Ce n'est pas mon problème actuellement...

D'après ce que j'ai pu lire dans les archives, justement, il y a d'ailleurs eu des précédents : il semble qu'une partie de la population de l'une des cités ait dû quitter elle aussi la planète, après s'être révoltée contre ce que les archives appellent le « Guide Suprême »...² Comme quoi, je ne suis pas le seul à avoir des problèmes d'adaptation... Mais les autres sont partis ensemble... Moi, je suis et reste seul...

Ce que j'ai appris sur Vinéa est proprement stupéfiant. Je connaissais le nom de ma mère. J'ai pu ainsi retrouver les archives, savoir qui elle était, ce qu'elle faisait, et pourquoi elle ne m'a pas élevé elle-même...

Je suis donc reparti dans le temps. Aknor m'a ramené sur Vinéa, à l'époque où j'étais enfant. Ma mère est technicienne à la Deuxième Cité. Mais je n'ai pas pu trouver de renseignements sur elle. Aucune donnée personnelle, à l'exception de son adresse. Pas de date de naissance, pas de dossier médical, de photo ou de renseignements sur sa formation, son cursus... comme si sa vie avait débuté avec son emploi à la Deuxième Cité.

Pas de trace non plus de ma naissance... Tous les renseignements que j'ai pu obtenir sur elle sont postérieurs... Comme si j'étais né avant elle...

Comment puis-je alors être son fils ? Je suis certain maintenant que ma mère n'est pas celle que j'ai toujours cru. Paradoxalement, je suis un peu rassuré. Tout ce que j'ai vécu n'était donc qu'un mensonge. Mais si je suis rassuré, c'est parce que je sais maintenant que quand je me sentais mal, quand je pensais ne pas être à ma place, décalé, ce n'était pas parce que j'étais fou, ou anormal, mais parce que c'était la vérité. Quelque part, je n'avais rien à faire là où j'étais. Et ce sentiment confus de décalage permanent, ce mal-être, prend enfin un sens...

Mais le mieux est peut-être de commencer par le commencement...


1 voir « Les Titans »
2 voir « La lumière d’Ixo »

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