dimanche 13 février 2011

A quoi pense-t-elle ?

Nouvel atelier chez Gwen ce dimanche. La liberté est totale, à partir du tableau qu'elle propose. On y voit une jeune femme assise devant un café. A quoi pense-t-elle ?


Il faisait frais en ce matin du 22 mai 1934. On avait beau être en Louisiane, le temps n'était pas encore à l'été.
Elle était attablée dans un café, où elle attendait patiemment son amant. Il lui avait promis de venir, mais il lui fallait être prudent. Son frère avait été tué pour moins que ça, sur le trajet d'une balle perdue... Elle savait bien qu'il se devait de prendre quelques précautions. Ce serait dommage qu'ils le retrouvent aujourd'hui, et de cette manière.
Elle se prit à rêver. C'était une journée calme qui s'annonçait. Tout était prêt pour la mission du lendemain, ils n'avaient plus qu'à attendre. Et cela leur laissait de nombreuses heures à passer ensemble. Elle attendait cela depuis plusieurs semaines : une journée entière sans rien d'autre à faire que d'être auprès de lui. Elle avait un certain nombre de choses à lui dire, de nombreuses questions à lui poser, mais elle savait que ce n'était pas le moment et avait décidé, malgré le poids qui pesait sur ses épaules, de ne pas le déconcentrer avant ce travail qu'ils devaient mener à bien ensemble. Cela risquait de compromettre sa réussite. Elle n'avait pas l'habitude de ne rien faire, et cette heure qu'elle venait de passer au café lui semblait être venue d'une sorte d'entre-deux, comme si le temps avait fait un pause dans sa course effrénée. Elle en avait été la première surprise, mais avait trouvé cela très agréable en définitive. Demain, après la conclusion de cette affaire, peut-être qu'ils pourraient enfin prendre un peu de temps pour eux. La mort de son beau-frère l'avait fait réfléchir. Sa belle-sœur avait été anéantie, et elle ne voulait pas subir le même sort. S'il mourait, elle ne lui survivrait pas. Elle l'aimait tellement ! Pour lui, elle était capable d'aller au bout du monde. Et elle était si jeune ! A 24 ans, on a encore toute la vie devant soi.

Le trajet vers Arcadia ne serait pas très long. Une heure ou deux, tout au plus : leur voiture était rapide et puissante. Si seulement son homme acceptait de s'arrêter là ! Mais il en voulait toujours plus. Cette vie qu'il lui proposait et à laquelle il l'avait habituée depuis ces deux dernières années était exactement ce dont elle avait toujours rêvé : excitante, exaltante, amusante aussi. Ils changeaient souvent de maison, c'est vrai, mais, surtout, il ne la traitait pas comme les hommes traitent d'habitude leurs femmes. Il ne la cantonnait pas au rôle d'épouse parfaite, qui doit tenir proprement la maison et préparer le dîner en attendant sagement son retour du bureau. Non, elle était son égale, son âme sœur, son associée, et ils prenaient ensemble toutes les décisions qui concernaient leur couple et leur vie. Elle avait beau tenter de se projeter dans l'avenir, elle ne parvenait pas à envisager de changement radical dans leur vie mouvementée. Des enfants ? Oui, bien sûr, elle y avait pensé ! Elle lui en avait même parlé. Mais il n'était pas prêt à abandonner sa vie aventureuse pour se poser bien sagement dans une petite maison proprette... Elle se demandait même si ce serait un jour possible. En réalité, si elle essayait d'être honnête avec elle-même, elle ne savait même pas si elle en avait réellement envie. Il lui faudrait abandonner cette vie ; les autres ne le leur permettraient sans doute pas. Et puis, que savait-elle réellement de lui, en dehors de la vie exaltante qu'ils menaient ? Comment était-il au quotidien ? Supporterait-il un travail routinier, répétitif, avec des horaires fixes et réguliers, et le tout pour un salaire de misère ? C'était si éloigné de leur vie actuelle... Il leur faudrait changer radicalement de mode de vie. Non, ça, ce n'était pas possible. Il aimait trop le luxe, les belles voitures, les costumes coupés sur mesure, pour s'en priver un jour. Et puis, elle aussi avait pris goût à cette vie, à ces facilités qu'elle lui donnait et ne tenait pas spécialement à s'en passer.
Et pourtant... Elle se disait qu'ils devraient arrêter un jour prochain. Elle se rendait bien compte que ça ne pouvait pas continuer de cette manière. Si seulement elle trouvait le courage de lui dire ce qu'il y avait au fond de son cœur, si elle arrivait à lui parler, tout pourrait peut-être encore s'arranger. Après tout, Clyde avait 25 ans. Il était jeune, il avait la vie devant lui. Sa Bonnie pourrait peut-être le faire changer d'avis ?
Demain...

Amélie Platz, 13 février 2011


Bonnie Parker et Clyde Barrow avaient programmé l'attaque d'une banque d'Arcadia pour le 23 mai. La police avait eu vent de ce projet et organisé une embuscade non loin de leur planque. Ils sont restés en alerte de 2 heures à 9 heures du matin, heure à laquelle la voiture des deux amoureux est arrivée à vive allure. Ils ont alors ouvert le feu, criblant la voiture de multiples balles et tuant Bonnie et Clyde au passage...

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